Discours du Maire
Mesdames et Messieurs les élus,
Madame Guingouin,
Madame la conseillère départementale,
Madame la Présidente locale de l’anacr,
Messieurs les porte-drapeaux,
Messieurs les représentants du corps de sapeurs-pompiers de St-Germain-les-Belles,
Madame et Monsieur les représentants de l’armée de terre,
Mes chers concitoyens, Mes chers amis.
« Nous soussignés, agissant au nom du Haut Commandement allemand, déclarons par la présente que nous offrons la reddition sans condition au Commandant suprême des forces expéditionnaires alliées de toutes les forces de terre, de mer, et de l’air sous le contrôle allemand».
C’était le 7 mai 1945 à 2h41 à Reims. L’Allemagne nazie avait capitulé sous contrôle soviétique, une seconde reddition fut signée. Les accords prirent effet le 8 mai à 23h01. L’Europe était en paix. Le 2 septembre suivant, la capitulation du Japon mit fin à la guerre la plus vaste et la plus meurtrière qu’ait connue l’humanité.
La Seconde Guerre Mondiale arracha à la vie plus de 60 millions de personnes. Pour la première fois dans l’histoire des conflits, elle tua plus de civils que de soldats : 45 millions de civils ont péri dont 6 millions de juifs exterminés dans la Shoah. Des millions de personnes déplacées, sans abri ni ressource, des dégâts matériels considérables, le monde était alors en décombres.
Libérée grâce à toutes les forces engagées, celle des armées alliées, celles des forces françaises libres, celles des combattants de la résistance, celle de l’armée d’Afrique, la France est alors un pays en ruines : 610 000 des siens ont péri, un million de familles sont sans abri ni ressource, les villes de Caen, Brest ou Le Havre sont rasées…
Dans notre secteur aussi, des personnes ont fait montre d’héroïsme, je pense à ce moment à Louis Gendillou qui nous a quittés dernièrement, ou à Georges Guingouin dont notre école communale porte le nom. Et je tiens à leur rendre hommage en ce jour. La paix d’alors, et celle qui demeure aujourd’hui, doit beaucoup à ces résistants.
Quand on évoque cette période, celle de la guerre et de l’occupation, l’honnêteté commande de ne pas occulter la part d’ombre qui fut aussi la nôtre. La France a subi des délations, la honte de la collaboration, celle du régime de Vichy, de « ses petites mains sales » miliciennes à ses élites ministérielles collaborationnistes, honte à eux pour toujours. Alors vous allez me dire pourquoi éclairer ce jour de cette part obscure de notre passé ? Mais pour rappeler que rien n’est jamais, ni prédéfini, ni acquis.
Ainsi la France aurait pu sombrer dans le camp de l’Axe. Il a fallu l’opiniâtreté du Général de Gaulle pour faire reconnaître aux Alliés la légitimité de la France libre et éviter que le pays soit placé sous l’administration militaire des forces coalisées.
De nos jours, qui peut affirmer que la Paix est à jamais acquise ? Chacun sait qu’elle est un bien commun, précieux, mais fragile. Avons-nous oublié qu’une guerre fratricide pouvait ravager le continent européen ? Avons-nous oublié que la Shoah fut le terrible aboutissement d’un processus de stigmatisation des juifs comme d’autres le sont aujourd’hui ? Avons-nous oublié que des Français ont collaboré par adhésion à la « révolution nationale » de Pétain ? Avons-nous oublié que la crise de 1929 fut le terreau de la guerre ?
« Par-delà le passé où sont nos souvenirs, le futur où sont nos espérances, il y a le présent où sont nos devoirs ». Beaucoup d’années sont passées depuis ce constat dressé par Lacordaire.
Ainsi, si douloureux soit-il, le rappel des souffrances des générations qui nous ont précédés, doit baliser le chemin de nos réflexions et inspirer le sens de nos actions. Ces souvenirs terribles, nous devons les transmettre avec d’autant plus de conscience que la perturbation de la mémoire s’étiole au fur et à mesure que disparaissent les derniers témoins de la seconde guerre mondiale. Il faut le rappeler avec force : des hommes et des femmes se sont levés, des hommes et des femmes ont refusé de se soumettre. Des milliers d’anonymes qui ont continué le combat, qui ont souffert derrière les barbelés des camps, qui ont entretenu la flamme de la résistance en consentant des sacrifices inouïs, et le plus fréquemment, celui de leur vie.
Cette cérémonie que nous célébrons ensemble est bien évidemment, je le disais tout à l’heure, d’abord la leur.
Ce jour de commémoration est celui de la victoire des valeurs de la République et de la Démocratie sur ce qui divise ; l’intolérance, l’indifférence, la xénophobie, le racisme et l’antisémitisme, l’individualisme, le repli sur soi ……. Tous ces ferments de haine pour demain doivent être combattus sans faiblesse. Car nous le voyons bien, hélas en ce moment, ces maux sont toujours prêts à ressurgir, et les illustrations actuelles ne manquent malheureusement pas…. !
2015 fut une année d’effroi et de douleur, car par deux fois la France a porté le deuil, par deux fois la République a été frappée lâchement par des terroristes qui ont réalisé de véritables carnages. Aussi en ce 8 Mai, je vous demande de méditer cette pensée d’André Malraux « La vraie barbarie c’est Dachau, la vraie civilisation, c’est d’abord la part de l’homme que les camps ont voulu détruire ».
Ainsi, la tête haute, riche de nos convictions républicaines, nous pouvons affirmer que le 8 mai devient, et chaque année d’avantage, le moment de symboliser et de rappeler ces valeurs de respect et de dignité tirées des leçons de notre Histoire qui doivent être transmises de générations en générations.
Nous devons nous souvenir aujourd’hui, demain, toujours, de ce que signifie ce 8 mai 1945. Et garder en nous, les trois grandes lumières que sont la Liberté, l’Egalité et la Fraternité, à laquelle j’en ajouterais une quatrième ; la Laïcité.
Celles et ceux qui comme moi sont nés après la guerre doivent se souvenir avec humilité de cette période. Nous n’avons pas été les témoins directs de cette tragédie. Nous n’avons pas vu, ni les camps de concentration et de déportation, ni les champs de bataille. Nous n’avons pas été confrontés à des choix dramatiques, personnels ou collectifs. Pour autant, se souvenir est une obligation ardente. ll est de notre devoir de ne pas oublier les causes qui entraînent la guerre, et les conséquences qu’elle amène à son tour. Il est de notre devoir de nous souvenir quelles valeurs et quelles idées nous ont été transmises en ce jour ou nous fêtons les 71 ans de la capitulation de l’Allemagne nazie pour ne jamais oublier.
Car comme le disait Victor Hugo « la guerre, c’est la guerre des hommes, la paix c’est la guerre des idées ».
Pour conclure, je vous demande à toutes et tous d’être vigilants, d’être des bâtisseurs et des soldats de la paix de demain, elle vous appartient, elle nous appartient.
Vive la Paix.
Vive la Liberté.
Vive la République.
Et vive la France.
Jean-Gérard Didierre