Il manquait des chaises, lundi soir, pour assister au conseil municipal de La Croisille-sur-Briance. Le maire, Jean-Gérard Didierre, avait invité la population à la séance pour aborder l’actualité de l’eau potable dans la commune. Le sujet a drainé près de 150 personnes, soit plus d’un habitant sur cinq.
Le maire a présenté un projet de tarification élaboré par une commission technique de la communauté de communes. Car c’est cet EPCI Briance-Combade qui doit récupérer la compétence « eau potable » à compter du 1er janvier (*).
Le prix multiplié par deux
La polémique ne date pas d’hier, mais le maire dénonce la hausse des tarifs proposés dans ce récent document : « on parle de 1,20 € la première année et un prix qui continuerait d’augmenter pour atteindre 1,60 € en 2023 ! On a aujourd’hui un prix au mètre cube parmi les plus bas de France, avec 0,80 €. Notamment parce qu’on a décidé d’en baisser le prix il y a deux ans, quand on s’est rendu compte que notre “excédent eau” – 50.000 € – ne se justifiait pas vraiment. Aujourd’hui, on paie deux fois moins cher son eau à La Croisille que si on vivait à Masléon ou Neuvic. Notre prix du mètre cube devrait doubler, alors que le leur va baisser… » Les dents grincent dans la salle.
Fonctionnement et travaux
Second problème avancé par le maire : « l’explosion des frais de fonctionnement. On parle de transférer ou de créer sept emplois, c’est très bien. Le souci, c’est qu’avec ce nouveau budget, les travaux devraient maintenant ne plus être financés que par l’emprunt… » C’est le troisième problème : le financement des travaux sur le réseau : « nous sommes la plus grande commune de la communauté, notre réseau était très ancien et crachait parfois de l’eau marron. La commune a refait de nombreux tronçons et tout ça fonctionne bien. Tous les deux ans, avec notre système actuel, on arrive à financer 80.000 € de travaux. Ça nous a déjà permis de refaire de nombreux tronçons et tout ça fonctionne bien maintenant. Il reste du travail, notamment la neutralisation du château d’eau. Mais le plan qui la prévoyait et qui devait commencer l’an prochain, est bloqué par toute cette histoire… »
« Dans les autres communes, en particulier celles qui vont y perdre, il n’y a pas de réunion publique, pas d’information… », regrette Jean-Gérard Didierre, laissant la parole aux habitants présents, assez remontés : « Quels sont les moyens pour lutter contre ça ? », lance la première intervenante. « Une pétition ? », lui répond une voix dans l’assistance. « Je me pose des questions, ajoute un troisième, quant à la légitimité des décisions des gens de la com’ com’, dont le seul but devrait être la solidarité intervillages. »
« Comment on sort de la com’ com’? », demande un autre. « On peut pas, lui répond le maire. Sortir, j’ai tenté, mais ça n’a pas marché… » « Il faut rester optimiste, insiste un retraité, Nombre de communes de France ont fini par obtenir satisfaction. » « Moralité, lâche un autre Crouzillot, ça vaut le coup d’aller voter ! » Car les élections municipales approchent à grands pas…
Motion et pétition
Le maire veut mobiliser contre cette hausse annoncée : « la commune de Surdoux a rejoint notre position et nous allons ensemble consulter un avocat pour voir comment réagir à une hausse d’une telle ampleur. » Une motion a été votée par le conseil municipal et une pétition circule déjà à La Croisille-sur-Briance. Jean-Gérard Didierre a également invité la population à participer à la prochaine réunion du conseil communautaire le 28 octobre à… La Croisille !
(*) Conséquence de la loi Notre, votée en 2015.
Une « hypothèse de travail »
et… un « moment difficile »
« Rien n’a été validé et encore moins voté, souligne Yves Le Gouffe, le président de la communauté de communes Briance-Combade. Je regrette que ces chiffres soient rendus publics alors que ce n’est qu’un projet… »
Ce projet évoque bien une hausse du prix de l’eau de 0,80 à 1,60 € le m³ d’ici 2023 à La Croisille-sur-Briance, la commune la plus impactée. David Couegnas, élu membre de la commission, justifie cette hausse : « aujourd’hui, il n’y a ni véhicule, ni essence, ni véritable budget “eau” à La Croisille et il y a 3.000 € de masse salariale à l’année… Ce n’est pas le coût réel, il est clairement sous-estimé à 0,80 € le m³ ! »
« Nous avons besoin d’harmoniser les prix sur le territoire de la communauté de communes, ajoute Vincent Echasserieau, directeur général des services. La moyenne nationale du prix de l’eau est autour de 2 € le m³, voire 2,15 € en territoire rural et les tarifs de l’eau vont augmenter pendant dix ans, partout en France. On a trop longtemps minoré le coût réel de l’eau. C’est un moment difficile pour les élus, mais on n’invente pas ces chiffres-là… » « Ces chiffres sont une hypothèse de travail, précise-t-il, dans laquelle on est obligé de prévoir un budget à l’équilibre. Du coup, il n’y a pas de budget pour les chantiers, on gérera avec des emprunts et d’éventuels excédents. »
Yves Le Gouffe reconnaît que « le débat est maintenant pollué par l’échéance électorale ». Quant à l’absence de réunion publique, « le sujet a été évoqué lors du dernier conseil communautaire. Jusque-là l’information passait par les communes, mais il faut que Briance-Combade aille à la rencontre de la population pour en parler et je m’engage à y aller ». Il se prépare déjà pour la réunion du 28 octobre à La Croisille…
Sylvain Compère
sylvain.compere@centrefrance.com